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CHAPITRE 2

L'usine
d'Achicourt

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En 1922, l’usine sort de terre sur un terrain de sept hectares. 18 000m2 de bâtiments se dressent le long de la voie ferrée reliant Paris et Lille via Arras. En façade, cette inscription visible depuis le train : “Ets BRACQ-LAURENT, FONDERIES, CONSTRUCTION MÉCANIQUE”. Mise en service deux ans plus tard, cette usine était alors considérée comme l’une des entreprises de la région les plus à la pointe du progrès. Ses machines-outils modernes et puissantes permettaient de fabriquer du très gros matériel. Large comme une avenue, un pont roulant pouvait soulever jusqu’à cinquante tonnes… Près de cent cinquante ouvriers travaillaient sans relâche à produire des pièces de fonte et de métal, toutes uniques. Les années passèrent au rythme des coulées hebdomadaires, 
jusqu’à la Seconde Guerre mondiale qui fit disparaître une partie de l’outil de travail et quelques clients. Une fois ces dégâts réparés et l’activité relancée bon an mal an, les frères Michel et Pierre Bracq décidèrent, dans les années 1960, d’engager des investissements pour la modernisation de leur usine. La fonderie et l’atelier de construction mécanique furent dotés de machines-outils plus récentes, tandis que le service achats approvisionnements, restructuré et dirigé par Gérard Fayeulle, développe sa tâche d’alimenter les ateliers et leurs quelque deux cents ouvriers en matière première. Ces derniers participèrent ainsi, entre autres grands chantiers, à ceux du Canal du Nord, de l’usine de retraitement des combustibles de La Hague, de centrales nucléaires…

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Ci-dessus :

Dans les années 1970, l’usine Bracq-Laurent réalisait une coulée par semaine et fabriquait entre 100 et 150 tonnes de pièces par mois.
À cette époque, plus de deux cents personnes y travaillaient. L’usine comptait alors parmi les plus gros employeurs de la ville d’Achicourt et de l’Arrageois.

Ci-dessus :

Vue de l’usine Bracq-Laurent dans les années 1950. Les bâtiments n’avaient alors pas changé depuis leur construction en 1922.

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Ci-dessus :

Après des jours, voire des semaines, de préparation minutieuse, l’immense moule est enfin prêt à être coulé. En quelques minutes, trois poches de coulée vont y déverser plus de 40 tonnes de métal liquide porté à 1 200°C. Au milieu des gerbes d’étincelles, tout le monde s’active sous la houlette, du responsable de la fonderie. Il faudra ensuite patienter quelques jours avant de découvrir la pièce…

La fonderie

 

Coeur battant de l’usine Bracq-Laurent: la fonderie ! “Le plus court chemin entre la conception d’une pièce et sa réalisation ”, selon Pierre Bracq. Au plus fort de l’activité, jusqu’à une centaine d’hommes y donnaient forme à des pièces de toutes tailles. Les plus imposantes pouvant peser plusieurs dizaines de tonnes. Tout d’abord, les modeleurs concevaient les modèles en bois indispensables au travail des mouleurs. À l’aide d’un fouloir à main ou pneumatique, ces derniers serraient le sable autour de la pièce en bois, façonnant ainsi le moule dans lequel allait couler le métal en fusion préparé par les cubilotiers. Une simple erreur lors de l’élaboration du moule, et tout était à refaire. Quelques heures ou jours après la coulée, une fois la fonte solidifiée, la pièce était libérée de sa gangue sableuse. Ne restait qu’à l’ébarber (enlever les bavures de métal) avant de l’envoyer à l’atelier d’usinage attenant à la fonderie.

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L'atelier de construction mécanique
 

Au Nord de la fonderie, se tenait l’atelier de construction mécanique. Spacieux et éclairé par de hautes verrières, il était l’univers de la machine-outil. Dans ce grand hall, toutes les

formes d’usinage étaient réalisables. Des pièces de toutes tailles, en provenance de la fonderie et de la chaudronnerie ou d’usines sous-traitantes, y étaient acheminées par de puissants ponts

roulants pour être manufacturées. Les ouvriers mettaient alors en route raboteuses, aléseuses, fraiseuses, tours, perceuses… Dans une étonnante symphonie mécanique, ces robustes machines

éraflaient, usinaient, perçaient, réduisaient sans cesse en copeaux le métal avec une extraordinaire minutie.

Ci-dessus :

Le grand hall de l’atelier de constructions mécaniques et ses imposantes machines. Il était équipé de ponts roulants, de potences et de portiques pour faciliter les manutentions. Derrière la cloison du fond se trouvait la fonderie.

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Ci-dessus :

Le grand hall dans sa configuration la plus récente. Il avait été réaménagé et équipé de machines plus modernes et plus performantes entre

les années 1960 et 1980, tel ce tour vertical Berthiez.

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Ci-dessus :

André Dujardin, chaudronnier, prenant la pose sur un turboséparateur 
qu’il a contribué à fabriquer et à assembler.

Ci-dessus :

Le soudeur assemblait les pièces façonnées par le chaudronnier.

La chaudronnerie

 

Autre pilier de l’usine Bracq-Laurent : l’atelier chaudronnerie. Sous les mains expertes des chaudronniers, les feuilles de métal y devenaient de véritables objets, de taille plus ou moins imposante. À partir du dessin fourni par les clients ou le bureau d’études, ces artistes de la tôle traçaient les contours, grandeur nature, de la forme voulue. Puis, à l’aide de chalumeaux, des cisailles ou autres outils, ils procédaient au découpage avant de façonner le métal. Presses, cintreuses, plieuses, rouleuses… entraient alors en action. Les éléments ainsi obtenus étaient ensuite assemblés et soudés. La pièce prenait corps. 
De 1879 à 1986, les chaudronniers de Bracq-Laurent suivirent cet immuable processus de fabrication, qu’il s’agisse de réaliser des fours à pyrites au début du XXe  siècle ou, plus tard, des éléments en acier inoxydable destinés notamment à l’industrie nucléaire.

Ci-dessus et ci-contre :

À partir des années 1960, l’atelier de chaudronnerie a diversifié ses activités, fabriquant de nombreuses pièces en acier inoxydable pour les industries nucléaire et chimique notamment.

De gauche à droite et de haut en bas:

coude chaudronné en cours de finition, carter de réducteur de plus de 50 tonnes, pompes en acier inoxydable pour le réacteur Osiris de Saclay, autoclave pour l’industrie chimique, fabriqué en 1958, il est la première réalisation en acier inoxydable de l’usine Bracq-Laurent, pompe à hélice destinée à vider une forme de radoub (bassin de mise à sec des navires).

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Ci-dessus :

Chariot de transfert et élévateur destiné à l’Atelier d’Entretien des Châteaux à l’usine Cogéma La Hague.

Le bureau d'études

 

Changement de décor. Dans le bureau d’études, les machines cédaient la place à des tables à

dessins, de grandes feuilles de papier roulées tels des parchemins, des crayons, des règles, des compas, des tire-lignes. À partir d’un croquis et de quelques notes prises lors d’un rendez-vous avec un client, les dessinateurs élaboraient les plans, les dessins et les nomenclatures des

machines qui allaient ensuite être fabriquées dans les différents ateliers de l’usine. Que d’esquisses chiffonnées ont fini dans les poubelles, de crayons ont été mâchonnés pour relever les défis lancés par certains clients et remporter ainsi un nouveau marché. Comme en 1978, quand ils ont eu à plancher sur ces chariots jaunes capables de soutenir 120 tonnes de charges de produits nucléaires, toujours en service à l’usine de retraitement de combustibles radioactifs de La Hague.

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Ci-dessus :

Derrière leurs planches à dessins, Daniel Labedz (au premier plan) et Christian Gaillard traduisaient sur un plan les idées du client afin de permettre la fabrication des machines souhaitées.

© Collection personnelle Christian Gaillard

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